Je suis une ancienne élève de l’Ort . Je vous transmets ce texte que j’ai écris il y a deux ans en souvenir d’une année de seconde. Un bel hommage à Monsieur Bendavid qui a changé ma vie : je lui souhaite une belle retraite bien méritée .
Le cancre :
Elle était le cancre au fond de la classe, l’élève qui ne comprenait pas.
Elle portait sur son dos un cartable lourd de désespoir.
Dans le regard des professeurs, de ses parents, de ses camarades, elle était « l’idiote » dont le parcours scolaire était une pénible traversée.
Le tableau noir, la page blanche, elle redoutait qu’on la questionne. Elle avait raté le train des petites classes et le domino de la défaite a multiplié ses lacunes, additionné ses échecs, divisé sa confiance.
Des professeurs en perte de patience ont laissé des traces humiliantes sur ses joues. Le doute s’était installé en elle, redoutable système qui enfermait, marquait, ancrait l’impression de nullité au fer rouge.
Par ailleurs, son cœur d’enfant battait : elle chantait, elle riait, elle observait le monde, le comprenait.
D’écoles primaires en Collèges privés, de redoublement en expulsion, aucun établissement ne parvenait à lui trouver sa place. À qui la faute ? A quel moment s’était-elle perdue, à quel moment le système n’avait pas su l’éduquer ?
À 15 ans, elle entrait en gare à 6h27 pour prendre un nouveau train, celui de la dernière chance : un collège qui préparait des enfants en difficulté à une formation professionnelle. L’ORT.
Elle s’asseyait au fond de la classe comme à son habitude.
Elle regardait autour d’elle et s’apercevait que tous les élèves lui ressemblaient, ils portaient tous, en eux, le poids de la défaite.
Le silence de la classe était palpable, chacun baissait la tête, se terrait. Puis soudain, la voix...une voix douce et réconfortante vint briser le silence : « Toi au fond de la classe, comment t’appelles-tu ? Viens te mettre au premier rang, approche, n’aie pas peur, je ne vais pas te manger. »
Le premier rang ? Là, tout près du professeur ?
Pour la première fois dans sa vie d’élève, elle aperçut le tableau blanc de l’espoir. On lui portait un intérêt soudain, on la regardait.
Le temps s’écoulait, captivant son attention, mettant en valeur ses interventions. Un professeur de Français allié aux autres, tous, brillants d’humanité allèrent chercher en elle l’étincelle, le supplément d’âme, le déclic. Les livres se succédaient, elle enchaînait les ouvrages avec frénésie, et contre toute attente elle aimait les mots, elle y trouvait du plaisir. Elle quitta le Collège à l’issue de cette année de seconde, elle se sentait prête à obtenir un baccalauréat général, un avenir. Elle referma le portail derrière elle, salua ses enseignants d’un geste de la main, recevant en échange ces trois mots qui, encore aujourd’hui raisonnent : « bonne route petite ».
Son chemin vers une vie meilleure commençait.
Aujourd’hui, cette petite fille devenue femme vous écrit, c’est une histoire vraie, c’est mon histoire.
Chers Professeurs, j’ose espérer qu’un jour ces mots vous parviendront. Il y a parfois des visages que l’on n’oublie pas. On aimerait les revoir et, à notre tour, leur tendre une main forte et reconnaissante. Merci, vous avez simplement fait votre travail et vous l’avez bien fait.
Le chemin de l’école n’est pas celui de la vie. Les prisons du talent enferment de nombreux génies qui ne savent pas compter.
Il n’y a pas de mauvais élèves, il n’y a que des mauvais enseignants ayant perdu le goût de la transmission.
Regardez donc au fond de votre classe, il y a peut-être des enfants que vous pourrez sauver.
Merci Monsieur Bendavid.
Estelle Amsellem ( Benyahia)- le 02 mars 2018
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